Carnets de dessins sur le travail du bois de Mathias Bonneau

Mathias Bonneau est bûcheron et entrepreneur de travaux forestiers dans le sud de la France. Il a publié trois carnets de dessins sur le travail du bois. Il y croque ses expériences de terrain, entre émotions, partage de passion et vulgarisation.

Mathias Bonneau, qui êtes-vous ?

Depuis mon plus jeune âge, j’ai accompagné mon père dans l’exploitation de la forêt familiale. Après des études d’architecture, j’ai eu un coup de foudre sylvestre et ne voyais  pas ma place ailleurs qu’en forêt. J’ai donc repris une formation en gestion forestière il y a cinq ans et exerce depuis lors comme bûcheron et entrepreneur et gestionnaire forestiers. En parallèle, j’écris et dessine des livres sur la forêt.

Mathias Bonneau

Comment est née l’idée de ces livres ?

Durant mes études, j’avais réalisé un carnet de voyage lors d’un échange Erasmus. L’expérience m’avait beaucoup plu dans l’idée de garder une trace de souvenirs. Lors de  mon premier hiver en forêt, j’ai tenté de mettre des mots et des dessins sur des sensations. Cela a donné ‘L’hiver au bois, carnet d’un bûcheron’. J’ai poursuivi avec un second  carnet ‘Une fois l’arbre à terre’, aux côtés d’un ami scieur mobile, et un troisième sur l’histoire d’un hêtre depuis sa récolte jusqu’à sa transformation en fauteuil.

Livre Une fois l'arbre à terre de Mathias Bonneau   

Qu’apporte le dessin dans votre démarche ?

Ce n’était pas nécessairement le but de départ mais les dessins ont un côté vulgarisateur. Les récits abordent et expliquent des métiers techniques. Lorsque je dois comprendre une matière compliquée, j’ai besoin de croquis et de schémas qui décortiquent l’information pour la rendre plus facilement assimilable. Le dessin a le pouvoir de simplifier les  explications. L’approche visuelle aide à mieux retenir. Il peut aussi figer des images intéressantes. Le carnet présente en outre l’avantage de pouvoir alterner entre croquis techniques et dessins.

L’expérience du dessin vous a-t-elle apporté un nouveau regard sur votre métier ?

Lorsque j’arrive dans une scierie, par exemple, comme tout professionnel du bois, j’ai inévitablement un regard technique. Ici, la démarche est différente car je recherche avant tout les émotions, le ‘beau’ et ce qui me donne envie de dessiner. Ça m’offre également le luxe de prendre le temps d’observer et de décortiquer des détails auxquels on finit par ne plus prêter attention dans l’exercice du métier au quotidien. C’est une forme de recul sur ma pratique. La réalisation de ces livres m’a aussi permis de faire énormément de rencontres de professionnels passionnés. Jamais je n’aurais pris le temps de ces échanges sans le prétexte des livres.

Quel regard portez-vous sur votre métier de bûcheron ?

J’adore mon métier et j’y vois une réponse à un besoin de notre société de disposer de bois. J’assume pleinement mon rôle et préfère largement travailler dans le bois que dans le béton ou le plastique. J’espère juste que mon témoignage de terrain à travers ces livres aidera à mieux faire comprendre notre filière. Quand on montre ce que l’on fait, on désamorce plus facilement des situations.

Extrait d'un carnet de dessins sur le travail du bois de Mathias Bonneau.

Le dialogue avec le grand public n’est-il pas justement un enjeu majeur ?

Certainement. Pendant des années, nous faisions partie des métiers oubliés que personne ne voyait. Depuis le covid, la forêt a énormément gagné en importance dans l’esprit des gens. Du jour au lendemain, on nous redécouvre et on attend de nous d’être en mesure de bien parler de nos métiers. On ne nous a pas appris ces compétences à l’école. Si on observe la situation attentivement, on remarque que tout le monde (ou presque) est amoureux de la forêt, mais pas de la même manière. L’enjeu est donc bien de créer du dialogue entre les différents points de vue.

Avez-vous de nouveaux projets ?

Oui, mais il n’est pas simple de combiner travaux en forêt et dessin en période de pic. L’alternance des deux me plaît énormément. Toutefois, vu que les activités se sont bien développées sur les deux plans, je suis parfois contraint de refuser des projets intéressants. Le rêve serait de pouvoir continuer à exercer mes deux passions en parallèle, mais sans pression.

 

Plus d’infos : www.mathiasbonneau.fr

 

Quelques morceaux choisis

 

« Le travail de bûcheron est un jeu avec la lumière. Je me sens sculpteur de lumière »

« Je promets des arbres à mes enfants »

« Le sciage mobile, c’est social »

« Le bois vient du brut et va vers le lisse, ce lisse qu’on apprécie dans les salons et les magazines »